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Fédérale 1 : le centre de l'USSS Benjamin Roquebert, à fond la ferme




Passionné par son métier, le phénomène saint-sulpicien ne regrette pas ses choix. Photo DDM, Nathalie Saint-Affre

Fédérale 1, Saint-Sulpice-sur-Lèze, Haute-Garonne Publié le 18/01/2021 à 05:08 l'essentiel : Personnage attachant et joueur hors-norme, il a renoncé à une possible carrière professionnelle pour rester dans son village, son club, et s’occuper de l’exploitation familiale. "Si tu avais voulu, tu aurais été pro." Cette phrase, Benjamin Roquebert (32 ans) l’a entendue des centaines de fois. "Il aurait dû jouer au Stade Toulousain, je le lui ai toujours dit", confirme Olivier Argentin, son entraîneur à Saint-Sulpice-sur-Lèze qui a su polir ce diamant brut au fil des saisons. Phénomène physique (1,84 m ; 118 kg), doté d’un coup de pied de mammouth sans égal (hormis peut-être François Steyn) et d’une passe à faire pâlir pas mal de trois-quarts du Top 14, le centre de l’USSS est l’une des attractions de la Fédérale 1 depuis bientôt 10 ans. "Un extraterrestre" "Je n’ai jamais joué à côté de quelqu’un d’aussi doué, lance Stéphane Doussain, son coéquipier. Il a des qualités au-dessus de la moyenne, avec un gabarit atypique et forcément, ça dénote." "On voit de lui sa capacité à casser des plaquages mais techniquement, c’est un extraterrestre. Tout est fluide, tout est facile", prolonge Argentin au sujet de celui qui a débuté par le ballon rond à 4 ans, à Carbonne. "On avait menti sur son âge et dit qu’il en avait 5 !", avoue malicieusement son père, Jean-Paul, à la tête de l’exploitation familiale – céréales et Limousines allaitantes (110 têtes) – sur les hauteurs de Capens, à une quarantaine de kilomètres au sud de Toulouse. Et à peine plus de cinq minutes en voiture de Gaston-Sauret, le fief de l’USSS. Son petit coin de paradis de 190 hectares de terre avec une vue imprenable sur les Pyrénées, "Farou" n’a jamais voulu le quitter : "L’exploitation familiale qui te tend les bras, quand tu es né dedans, c’est difficile de s’en séparer." C’est là qu’il nous a reçus, autour de la grande table en bois de la "fournière", cette pièce du corps de ferme équipée d’une cheminée et laissée volontairement dans son jus. Un lieu à l’image des propriétaires, authentique et chaleureux, où l’on peut refaire le monde – autour de pièces de viande maison, qui alimentent la boucherie de Saint-Sulpice depuis 25 ans – comme faire le cochon. C’est là qu’il y a conduit, encore court sur pattes, son premier tracteur. "Papa, je veux conduire ! Papa, je veux conduire ! Je suis descendu et je lui ai dit : ‘‘démerde-toi !’’", raconte Jean-Paul, provocant l’hilarité du fiston. "Je ne touchais pas aux pédales donc je tournais en rond car je ne pouvais pas m’arrêter !", s’esclaffe ce dernier. C’est aussi là, avec son frère aîné Jérémie, qu’il a façonné sa technique, à force de parties de gagne-terrain et de passes échangées qui ont usé pas mal de ballons et obligé son père à régulièrement réviser la toiture… Des pénalités de 65 m ! Aujourd’hui, celui dont les pénalités longue distance – 65 m à Aire-sur-l’Adour, à peine moins à Balma ! – ont fait le tour de la toile – et dire que son premier tee n’était autre qu’un rouleau de… papier toilette ! – est bien malheureux d’être privé du terrain et des bringues avec les copains. "S’il n’y avait pas ça, le rugby ne m’intéresserait pas. Le dimanche à 15 heures, c’est important. Mais après, ça l’est encore plus pour Saint-Sulpice. S’il n’y a pas de copains, cela ne peut pas marcher sur le terrain. Notre salut est passé par là." Et c’est assurément ce qui explique que Benjamin Roquebert, parfaite définition du rugby de clocher, amoureux de son club et de son village, ne soit jamais allé plus loin que la Fédérale 1. L’opportunité d’aller tutoyer le haut niveau, il l’a pourtant eue. C’était il y a un peu plus de 10 ans, à Colomiers, alors que Castres et Albi avaient également frappé à la porte. "Beaucoup de monde me disait : ‘‘ à 20 ans, tu es mûr, c’est maintenant ou jamais’’", raconte-t-il. Mais l’aventure avec le club à la colombe ne durera que de septembre à décembre, malgré un statut de titulaire chez les Espoirs. "À la muscu, je n’ai pas tordu toutes les barres !" "J’avais choisi la solution de facilité mais j’ai vite senti le besoin de revenir aux sources. Ce n’était pas mon truc, reprend Benjamin. À la muscu, je n’ai pas tordu toutes les barres, je me le faisais tranquille (rires) ! C’est un monde à part, il faut être calibré, programmé. Pour moi, le rugby a toujours été un loisir et je tire mon chapeau à ceux qui sont pros parce que ce n’est pas aussi génial qu’on veut bien le croire." Pas étonnant donc qu’il ne soit pas monté dans le train lorsqu’il est passé une deuxième fois, quelques années plus tard en direction de Montauban, malgré un coup de fil de Xavier Péméja en personne. De quoi faire naître des regrets ? Il jure que non : "Regretter c’est un bien grand mot. Connaître le niveau, oui, parce que j’aurais aimé me tester. Après, être pro et vivre de ça, non. Mon premier plaisir, c’est de me lever pour faire de l’agriculture et monter sur mon tracteur. Et mon autre plaisir, c’est d’aller le mardi et le jeudi à l’entraînement, et le dimanche de jouer au rugby. Sans me prendre la tête." Alors qu’il devait arrêter au printemps, gêné par un genou grinçant, il poursuivra l’aventure au moins une année de plus avant de se consacrer pleinement à son exploitation. Mais que ses fans se rassurent, avec Sacha, 2 ans et demi, la relève est en préparation. Matthieu Gherardi

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